La coopérative Agropur, un fleuron, est devenue l’une des principales entreprises de transformation alimentaire au Québec. Les succès d’aujourd’hui sont aussi l’héritage du travail des pionniers d’hier. En fait, dès ses débuts, le mouvement coopératif agricole a évolué en symbiose avec le secteur laitier et ce lien explique en grande partie le succès de l’un et de l’autre à travers le temps.
C’est en effet dans le domaine laitier qu’apparaissent ici les premières formes de coopératives agricoles au Québec. Au 19e siècle, les conditions de production de beurre et de fromage évoluent rapidement. Leur fabrication requiert des investissements, des équipements de transformation et des volumes d’approvisionnement qui obligent les producteurs à des mises en commun. La mutualisation pratiquée par de modestes fermiers permettra de compenser la faiblesse des moyens de chacun. La coopération apparaîtra comme la formule idéale pour permettre aux propriétaires exploitants de se tailler une place sur le marché des produits laitiers. Une première coopérative est fondée à Dunham en 1865 tandis qu’une autre, à Athelson (Huntingdon), se lance dans la fabrication de fromage en 1873. Suivront les coopératives laitières de Baie-du-Febvre et de la Rivière-Ouelle qui voient le jour en 1883. La formule fait ses preuves, les producteurs laitiers sont de plus en plus nombreux à y recourir. En 1908 est adoptée la Loi des sociétés coopératives agricoles, qui fournira un cadre institutionnel propice au développement futur du secteur.
Naît en 1910, à Rimouski, l’une des coopératives mères de la Coopérative fédérée, la Société coopérative agricole des fromagers. Son audace fera prendre un tournant majeur à la commercialisation du fromage d’ici. En s’affirmant devant des pratiques déloyales, elle renversera les conditions que lui faisaient subir courtiers et exportateurs de Montréal qui ne leur accordaient qu’une fraction du prix consenti aux fromagers d'Ontario. La pratique voulait que le fromage canadien de mauvaise qualité fût systématiquement étiqueté « Quebec » alors que les produits de bonne qualité étaient étiquetés « Ontario ». En 1920, la coopérative ose vendre sous l’appellation « Quebec Farmers Cheese » certains de ses meilleurs fromages sur le marché anglais, mettant fin à une la discrimination. Le geste porte et le succès suit. En 1938, la Coopérative fédérée, forte des initiatives prises dans les années auparavant produisait 45% du fromage québécois, l’élan était donné.